vendredi, juin 11, 2010

Monsieur Labaume, donnez-moi donc pour 2$ d'art svp

Monsieur Labaume,

Que ferions-nous sans vous? Qui nous fouetterait le sang et nous ferait sortir de nos gonds? Vous nous permettez de mettre au grand jour les questions de fond et d'en débattre sur la place publique.

La toute dernière indignation collective provoquée par votre questionnement quant à la fonction et la pertinence de la collection d'œuvres d'art acquise par feu Mme Boucher et exposée à l'ancien Hôtel de Ville de l'arrondissement Ste-Foy Sillery me fait réagir à mon tour. Vous désirez faire évaluer cette collection et évoquez la possibilité de vendre certaines des œuvres qui la composent. Je suis bien d'accord pour l'évaluation, il est tout juste normal qu'une municipalité connaisse la valoir de ses avoirs. Par contre, quel message envoyez-vous en voulant "liquider" des œuvres? Qu'en est-il de votre vision de Québec comme leader culturel?

Usant de sa crédibilité d'artiste dans ce dossier, la conseillère Chantal Gilbert vous accorde son appui, mais précise que l'argent récolté, de l'éventuelle vente d'œuvres devrait être réinvesti dans des projets liés à la culture. Elle ajoute que ces œuvres achetées avec l'argent public sont actuellement accrochées dans des bureaux de fonctionnaires et que les citoyens ne peuvent pas les voir. J'aimerais simplement lui faire remarquer que les Musées sont remplis d'oeuvres accessibles aux citoyens, qu'il y a même au moins une journée gratuite par année pour permettre à tous les citoyens de voir de l'art, mais qu'une grande majorité d'entre eux n'ont jamais mis les pieds dans un Musée. Le fond de la question n'est certainement pas là. Ce sont de faux arguments. Le soutien aux artistes par l'achat de leurs œuvres et la préservation du patrimoine artistique sont en elles-mêmes des causes qui justifient largement l'investissement de deniers publics, il me semble que la preuve n'est plus à faire. Je trouve Mme Gilbert bien timide dans sa proposition, sachant que le terme " lié à la culture " est si flou, que l'argent pourrait être utilisé à financer à peu près n'importe quoi de vaguement culturel. Qui dit culture ne dit pas art, il serait bon de s'en rappeler.

D'autres encore avancent que l'argent doit être réinvesti dans des œuvres d'artistes encore de ce monde plutôt que celles de peintres défunts, ou encore dans des projets de 1%(intégration à l'architecture). De bonnes idées sans doute.

À mon avis par contre, c'est Louis Lacerte de la Galerie Lacerte, art contemporain qui a mis le doigt sur le vrai bobo. Il s'insurge contre le fait qu'à chaque fois qu'un politicien ou autre personnage public s'emploie à donner une valeur uniquement marchande à l'art, la cause des artistes recule. Il a raison, il y a déjà bien assez de gens qui considèrent que les artistes sont des bébés gâtés et que l'investissement en art est de l'argent gaspillé. Malheureusement, des propos comme les vôtres monsieur le maire apportent une eau stagnante à leur moulin grinçant!

Monsieur Labaume vous vous targuez de vouloir faire de Québec la capitale Culturelle du Québec, entrant ainsi en compétition avec Montréal qui en revendique le titre de plus en plus haut et fort et Saguenay. Or, votre questionnement quant à la pertinence pour une ville comme Québec de "dépenser " autant d'argent pour l'achat d'oeuvres est à mon avis une contradiction énorme avec vos intentions professées. De grâce, trouvez une façon de rendre ces tableaux visibles aux citoyens, invitez-les à découvrir LE TRÉSOR que possède LEUR ville, soyez cohérent avec vos intentions exprimées. Vous êtes un leader et votre exemple a certainement un impact important dans l'opinion des gens. Cette approche d'épicier envers des acquis dont la valeur transcende largement le prix sur l'étiquette ne peut qu'éloigner Québec de sa fonction de leader et de visionnaire sur le plan artistique, partie importante de cette vision culturelle. Je pense qu'à chaque fois que l'on se met à considérer la valeur du travail des artistes au même titre que le prix de la côtelette de porc, on fait un grand pas en arrière.

Il n'en tient qu'à vous de faire quelques pas de l'avant pour regagner un terrain qui n'est peut-être pas encore perdu.

vendredi, juin 04, 2010

Rédemption de l'omission


Dans mon dernier billet également publié dans PUNCTUM, j'écris: "Les médias, selon leurs habitudes, se sont donné le mot pour couvrir essentiellement les mêmes pièces, et trop d'œuvres restent dans l'ombre."

Si cette phrase est vraie, elle est incomplète. Il existe UN média qui couvre sans faillir la Manif' en long et en large, de haut en bas, par dedans et par dehors, par monts et par vaux, par beau temps, par mauvais temps, etc... Je parle ici de l'émission spéciale de l'Aérospatiale sur les Ondes de CKRL. Cette émission est réalisée et animée par Jean-Pierre Guay (mon Éternel Adolescent à Binocle) accompagné de Richard Ste-Marie et Anne-Marie Bouchard. La mise en ondes est assurée par Maël Pinard et François Tremblay.

Est-il encore besoin de mentionner que Jean-Pierre et ses collègues travaillent bénévolement avec une joie et une passion pour l'art qui ne se dément pas et qui est fort contagieuse. Jean-Pierre Guay réalise et anime aussi l'édition régulière de l'Aérospatiale avec son fidèle comparse Richard Ste-Marie et leurs nombreux collaborateurs.

L'Aérospatiale est la seule émission 100% ARTS VISUELS au Québec.. deux heures chaque semaine où l'on parle de ce qui se fait à Québec en arts visuels; c'est du bonbon, non?

Pour entendre l'intégrale des émissions régulières de l'Aérospatiale cliquez ici

photos:
courtoisie de CKRL
haut de page: Denise Leclerc, productrice "Les routes enchantées" et
Jean-pierre Guay, producteur "L'aérospatial"
au bas: Richard Ste-Marie

mercredi, juin 02, 2010

Notre top 6 de la Manif' d'Art 5

Depuis mon article sur la Manif d’Art 5 dans Punctum et Akimbo, j’avais en tête de parler de mes coups de cœur. Les médias selon leur habitude se sont donné le mot pour couvrir essentiellement les mêmes pièces et trop d’œuvres restent dans l’ombre. Il est temps de tourner les projecteurs vers ces œuvres et briser enfin ce consensus médiatique irritant, comme me le faisait remarquer un copain.

J'ai donc discuté avec le célèbre duo Cooke-Sasseville qui participent à la Manif', et j'ai rédigé ce qui suit. Vous comprendrez que je partage leurs choix avec un léger bémol cependant pour l'œuvre de Daniel-Joseph Martinez.

Folie-Culture - Le loup gris : Pour l'aspect kermesse de l'évènement. Le grand loup y prenait des airs de Pinata échevelée. Réjouissant que ce déversement des entrailles du grand loup et avec elles toutes les peurs et les angoisses des petits loups. Entre les mains des spectateurs, les idées noires se sont effritées pour ne laisser que la joie païenne de mettre à mort le grand méchant loup. Vous pourrez d'ailleurs voir la vidéo de l'évènement ici

Doyon-Demers - PLAN B : Pour le côté vertigineux qui prend toute son ampleur dans le contraste entre l’aspect claustrophobe des conteneurs et de leur contenu. Cette rencontre avec le vide déstabilise, nous laisse entre la nausée du vertige et l’euphorie de flotter dans le vide.

Daniel –Joseph Martinez : REDEMPTION OF THE FLESH: IT’S JUST A LITTLE HEADACHE, IT’S JUST A LITTLE BRUISE; THE POLITICS OF THE FUTURE AS URGENT AS THE BLUE SKY: Personnellement, c’est le titre de la pièce qui me séduit le plus. Pour Cooke-Sasseville c’est le mélange organique et mécanique qui en fait un coup de cœur en plus de la réalisation impeccable et l’odeur (beurk). Anecdote : Pierre Sasseville me racontait qu’il est maintenant impossible au public d’entrer dans la salle où se trouve l’installation. Les planchers et les murs sont maintenant à ce point tapissés de « sang » que les spectateurs se retrouvaient les chaussures maculées et contaminaient les alentours d’empreintes sanglantes. Quelle image!!!

Amélie-Laurence Fortin-TRIOMPHE : Tout d’abord pour la rareté de ce médium au sein de la Manif : le dessin, mais surtout pour l’immense qualité de réalisation de l’œuvre, la pertinence des propos illustrés, bref pour le côté achevé de l’œuvre.

Maryam Jaffri- Death with friends : Seule œuvre vidéo de la liste de Cooke-Sassseville et de la mienne. Pour la qualité de la réalisation, la beauté des images. C’est une œuvre de facture classique à laquelle la narration apporte un côté vaporeux et séduisant.


AJOUT DE BIG SISTA- Bill Burns- Bird radio for the Afghanistan : tout dans cette œuvre me plait. L’utilisation des matériaux de récupération, l’esthétique, la précision de la reproduction des chants d’oiseaux, mais surtout, le choc au cœur que l’on ressent quand on comprend que le silence des oiseaux marque la réalité de la guerre. Bill Burns présente une œuvre qui peut faire sourire au départ, mais qui m’a laissé la gorge serrée.

Vous pouvez lire la version anglaise de ce :"hit list" sur AKIMBO

crédits photos: Amélie-Laurence Fortin: Christian Fortin, toutes les autres photos sont gracieusement fournies Marie-Ève Charlebois, Communication, Manif' d'ART 5