L'Amérique, Wilde et Beuys
En ce moment , je lis beaucoup Oscar Wilde. Je me délecte de son esprit brillant, vif , soyeux et élégant comme une parure de femme. Ses traits d'esprits sont célèbres,et je retrouve aussi sous sa plume l'évocation précise de son époque, de sa société. Il récolte à son heure l'adulation et l'affection de la société Victorienne. Les hommes le trouvent spirituel et charmant, les femmes aussi, même si elle le trouvent un peu concurrent. Puis, il connait la diffamation, l'opprobe, la prison, la déchéance. Son époque a finalement raison de lui.
Parmis ses textes, j'ai trouvé, entre autres choses, certaines conférences et chroniques relatant ses impressions de voyage en Amérique: Impressions of America, London 1912, The American Invasion, Court and Society Review, March 23rd 1887 et le très savoureux: The American Man, Court and Society, April 13rd 1887. Ces textes m'ont évidemment beaucoup fait sourire, et je n'ai pu m'empêcher de faire certains parrallèles entre ses mots et les observations d'autres artistes plus récents, sur la société américaine.
L'Amérique qui émerge de chroniques de Wilde ressemble-t-elle à celle d'aujourd'hui? Il me semble la voir en tranparence, déjà profilée sous la plume légère et implacable du poète: "Je crains de ne pouvoir dépeindre l'Amérique comme un paradis" ou encore : " L'Amérique est la plus bruyante nation de tous les temps" . Dans cette Amérique pleine de contrastes et de contradictions, c'est la Femme américaine qu'il aime surtout. Il la trouve vive, jolie spirituelle, délicieusement superficielle: " Rien n'est plus distrayant que d'observer deux jeunes filles américaines qui se saluent dans un salon ou au Row: avec leurs cris de joie au staccato aigu, leurs singulières petites exclamations, on dirait des enfants". Son appréciation de ces choses en dit long sur Wilde lui-même.
L'Homme américain quant à lui, ne trouve pas grâce aux yeux du Dandy: "Il est l'homme sensuel moyen de M. Renan, le Philistin, classe moyenne selon M. Arnold. Il juge la civilisation aux téléphones; le plus sauvage de ses rêves utopiques ne s'élèvent pas au dessus des chemins de fer aériens et des sonnettes électriques..(sic) Son canon de beauté est la grosseur, son modèle de perfection, la hauteur. ( Wilde parle ici de bâtiments, enfin je suppose)
"Il mesure la grandeur d'un pays au nombre de ses mètres carrés, et ne se lasse jamais de raconter aux garçons d'hôtel que l'État du Texas est plus grand que la France et l'Allemagne réunies.."
Il écrit aussi toujours en parlant de l'homme américain: "L'Art n'a rien de merveilleux pour lui, la Beauté, aucun sens, le passé, nul message"
Il écrit aussi toujours en parlant de l'homme américain: "L'Art n'a rien de merveilleux pour lui, la Beauté, aucun sens, le passé, nul message"
Dur jugement! Je me demande si c'est cet américain là que Joseph Beuys (artiste Allemand, 1921-1986) disait chercher en 1974, lorsqu'il proposa sa performance : I Like America and America likes me. Beuys arrive à New York en mai à la galerie René Block, clamant être à la recherche du dernier vrai américain. Il s'installe alors dans la galerie et coexiste pendant trois jours avec un véritable coyote du Texas, en jouant de sa canne et en arborant une cape de feutre. Visibles derrière un grand grillage, l'homme et l'animal partageront ensemble le feutre, la paille et le territoire de la galerie.
Commentaire mordant sur une Amérique assassine de sa nature, de son passé de sa culture?
Les deux artistes auraient-ils partagé une même vision? Je ne sais pas. Oscar Wilde me charme, et me fait rire par la justesse de son propos, Joseph Beuys lui, ne me fait pas rire, mais son propos n'en est pas moins juste.
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