samedi, octobre 28, 2006

Martin Dufrasne

Comme je l’ai déjà écrit dans un billet précédent, le courage qui fait parfois partie de la démarche artistique me touche particulièrement. Parmi les œuvres dont le propos, l’esthétique, l’audace et ….. le courage m’ont touchée, il en est deux qui m’habitent encore. Ce sont deux œuvres d’un même artiste : Martin Dufrasne. Une que je n’ai pas vue, mais dont nous avons abondement discutée Martin et moi lors de sa préparation, et l’autre que j’ai vue plusieurs fois lors de son exposition il y a quelques années.


L'art actuel, monnaie d’échange, troc gratuit?



Se refaire un salut
est l’exposition de Martin Dufrasne que je n’ai pas vue. Martin y étalait au sol ses possessions - disques compacts, vêtements, lettre et photos personnelles. Il proposait au public un échange : prendre un de ses biens contre un autre de même nature. Un troc, un échange, une conversation en quelque sorte. Un espace de négociation qui a provoqué des situations cocasses, touchantes et même presque tragiques. Car ce travail de Martin, ne faisait aucun compromis, les objets proposés au public n’était pas triés, on n’y avait rien retiré, il n’existait pas de lieu protégé où cacher les objets intimes secrets, révélateurs du passés des amours, des victoires et des défaites. C’est ça qui m’a bouleversée et qui me bouleverse encore : se dévoiler au monde et attendre de voir ce qu’il dévoilera en retour, présenter ses souvenirs ses photos, les lettres de ses amants comme la monnaie d’un échange qui ne peut être qu’inéquitable. Se défaire de ses secrets et de ses souvenirs. Quel courage faut-il pour se placer dans un espace public, sans recoin ou pièce fermée où l’on pourra se réfugier



Mon Régime
Dans cette oeuvre, Martin Dufrasne construit un récit, il récapitule l’histoire de 10 ans de vie d’artiste. Agglomérés en un immense cube posé sur le plateau d'une balance toute aussi immense, se trouvent des pièces, des matériaux des objets rappelant tout le travail d'un décennie. Le madrier reliant les deux plateaux de la balance est posé en équilibre sur les cahiers d'artiste de Martin, tandis que le deuxième plateau est occupé par son lit . Le balant entre le travail, l'inspiration et la paresse, la fuite.

Dufrasne explore ses lignes directrices, ses lignes plus floues, ses égarements. Il condense en une immense agglomération de mementos dix années de pratique artistique, il en fait la synthèse, mais encore une fois il la présente sans artifice ni faux-fuyants. 10 années de conviction et d’errance, d’abandon, 10 ans de succès et de flops. Il se ramasse sur lui-même, condense son passé pour mieux sauter dans le futur.


Le titre n’est évidemment pas anodin, MON RÉGIME parle d’une hantise qui plane sur l’œuvre de Dufrasne : la tyrannie de la consommation. Celle qui nous bouffe et nous fait bouffer, celle qui épuise et menace la survie de notre progrès. S’interroger sur sa ligne,s’interroger sur MON RÉGIME

Dufrasne nous demande : À quoi se mesure l’appétit? La faim de l’Art.

Ne manquer pas mon prochain billet : CARL ET MARTIN, CÉLÈBRE DUO DE…………………